La sagesse devant une bourrasque commande de se comporter comme le roseau. Cette plante aquatique à tige droite et lisse apparemment fragile se plie, laisse passer la menace, puis se redresse le moment venu, c’est-à-dire une fois le danger passé. Nous nous sommes toujours comportés comme le roseau. La guerre de libération de 1996, la guerre d’agression de 1998, les étapes de Sun City et du 1+4 etc. le prouvent amplement. La remontada est certaine.
L’Opposition que nous allons devoir incarner aura toutes les chances d’être la plus responsable qui soit depuis l’accession du Congo à l’indépendance le 30 juin 1960.
En effet, ce ne sera pas une Opposition autoproclamée comme l’a été 37 ans durant l’Udps de 1982 à 2019. Ce sera une Opposition parlementaire issue des urnes et, à quelque chose malheur est bon, rendue compacte après la requalification de la Majorité parlementaire ayant tout du patchwork qu’elle était jusque-là.
Ce sera une Opposition composée de femmes et d’hommes qui connaissent et maîtrisent les arcanes du pouvoir, de la gestion de la Res publica, ce qui n’a jamais été le cas de l’ancienne.
Elle sait ce que représente la conduite des affaires de l’État dans tous les domaines de la vie nationale : politique institutionnelle et non institutionnelle, administration publique, sécurité, justice, diplomatie, macroéconomie, social, culturel…
Elle n’agitera pas la rue par simple stratagème de victimisation pour s’attirer la sympathie des ONG de défense des droits de l’homme, des mouvements dits pro-démocratie, des médias et, probablement, des confessions religieuses. Cette stratégie stérile n’a pas pu venir à bout du régime dictatorial qu’elle combattait.
Républicaine, elle s’en tiendra à la légalité établie entre autres dans la loi n°07/008 du 04 décembre 2007 portant statut de l’opposition politique en République Démocratique du Congo, loi établissant ses droits et ses devoirs.
Aux termes de l’article 16, l’Opposition a pour devoirs de :
1. Respecter la Constitution, les lois de la République et les institutions légalement établies ;
2. Défendre les intérêts supérieurs de la Nation ;
3. S’abstenir de recourir à la violence comme mode d’expression et d’accès au pouvoir ;
4. Privilégier le dialogue et la concertation sur les grandes questions d’intérêt national et dans la résolution des différends politiques ;
5. Promouvoir le pluralisme politique et reconnaître le droit de la majorité à gouverner ;
6. Promouvoir la culture démocratique notamment par la tolérance, la non-violence et le soutien du principe de l’alternance dans le cadre d’une lutte politique pacifique ;
7. Concourir, par la libre expression, à la formation de l’opinion publique ;
8. Former et informer ses militants sur les questions touchant à la vie nationale.
Aux termes de l’article 8 de la même loi, les droits de l’Opposition sont :
1. Etre informée de l’action de l’Exécutif ;
2. Critiquer ladite action et, le cas échéant, formuler des contre-propositions, sous réserve du respect de la loi, de l’ordre public et des bonnes moeurs ;
3. Présider alternativement avec les députés et sénateurs de la majorité, les travaux des commissions de contrôle ou d’enquête de l’action de l’Exécutif ou d’en être rapporteur sans préjudice des prescrits des règlements intérieurs de chacune de ces Assemblées délibérantes ;
4. faire inscrire des points à l’ordre du jour des assemblées délibérantes.
A ce sujet, l’article 9 précise : « Le droit à l’information visé à l’article 8 est garanti à l’Opposition politique sur toutes les questions importantes de la vie de la Nation ».
LA REPONSE A TOUT EST DESORMAIS JURISPRUDENCE
Penser un seul instant qu’évoluer dans l’Opposition dans ce pays est un calvaire, c’est avouer qu’on n’a jamais sû ce que représente le Contre-Pouvoir dans un régime démocratique. C’est admettre qu’on a été opposant (des décennies durant) sans savoir pourquoi.
Quand, en plus, un tel aveu émane d’un cadre du parti aujourd’hui au Pouvoir, on comprend pourquoi la gestion de la Res publica fait flop et qu’on a vite fait de trouver dans le FCC un bouc-émissaire. L’Opposition FCC, la meilleure du pays en 61 ans d’indépendance, arrive d’ailleurs bien à propos, surtout lorsque la réponse à tout est désormais jurisprudence.
Barnabé Kikaya Bin Karubi
Ancien Député, Professeur, Université de KINSHASA, Faculté des Lettres, Département des Sciences de l’Information et de la Communication, Kinshasa, R.D. Congo.
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