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Décryptage

L’Afrique de l’Ouest face au défi du ralentissement économique

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Face aux turbulences économiques mondiales et aux incertitudes politiques internes, la croissance de l’Afrique de l’Ouest a ralenti à 3,5 % en 2023 selon le Rapport sur les Perspectives Economiques Sous Régionales de la Banque Africaine de Développement. L’inflation, la dépréciation des monnaies et l’endettement des États compliquent encore la reprise. Pourtant, deux économies résistent et affichent des perspectives encourageantes : la Côte d’Ivoire, portée par son industrialisation et ses infrastructures, et le Sénégal, qui mise sur l’exploitation de ses hydrocarbures pour accélérer son développement.

Un ralentissement généralisé, mais des signaux contrastés

L’Afrique de l’Ouest traverse une période d’incertitude économique. Après une croissance de 3,9 % en 2022, la région a vu son dynamisme ralentir à 3,5 % en 2023. Plusieurs facteurs sont à l’origine de ce fléchissement : une inflation galopante, la montée des tensions politiques, ainsi que la volatilité des matières premières. La crise du coût de la vie, exacerbée par la dépréciation des monnaies nationales et la faiblesse de la demande mondiale, pèse lourdement sur la consommation et l’investissement.

Le Nigeria et le Ghana, traditionnellement les moteurs économiques de la région, connaissent des difficultés persistantes. Le Nigeria, qui représente environ 60 % du PIB de l’Afrique de l’Ouest, affiche une croissance limitée à 2,9 % en 2023, loin des niveaux nécessaires pour absorber la croissance démographique et améliorer les conditions de vie. De son côté, le Ghana, après une période de croissance soutenue, souffre d’un endettement excessif et d’une inflation atteignant 40,3 %, ce qui freine les investissements et la consommation.

Dans ce contexte morose, certains pays affichent des performances remarquables, notamment la Côte d’Ivoire et le Sénégal, qui se positionnent comme les nouveaux moteurs de la croissance régionale.

Côte d’Ivoire : Une diversification économique en marche

Avec une croissance attendue à 6,8 % en 2024, la Côte d’Ivoire s’impose comme l’un des pays les plus dynamiques d’Afrique de l’Ouest. Son modèle repose sur une diversification progressive et une politique d’investissements structurants.

L’industrialisation est un axe clé de cette transformation. Le secteur industriel représente 29 % du PIB et connaît une montée en puissance, notamment dans la transformation des matières premières agricoles. Le pays, premier producteur mondial de cacao, investit dans la transformation locale pour capter davantage de valeur ajoutée. L’anacarde et l’hévéa suivent une trajectoire similaire, avec des usines de transformation en développement.

L’infrastructure constitue un autre levier de croissance. L’État ivoirien mène une politique ambitieuse de modernisation des routes, des ports et du réseau énergétique, facilitant l’essor du secteur privé. Le Grand Abidjan, moteur économique du pays, bénéficie d’un renforcement de ses connexions avec l’intérieur du pays et les États voisins.

Mais le pays reste exposé aux chocs extérieurs. La dépendance aux matières premières agricoles le rend vulnérable à la volatilité des prix. De plus, bien que les finances publiques soient relativement saines, la mobilisation des recettes fiscales doit s’améliorer pour accompagner l’expansion économique sans alourdir l’endettement.

Si la trajectoire actuelle se maintient, la Côte d’Ivoire pourrait renforcer son rôle de locomotive économique régionale, avec un modèle basé sur la transformation industrielle et l’amélioration des infrastructures.

Sénégal : L’ère des hydrocarbures ouvre de nouvelles perspectives

Le Sénégal s’apprête à entrer dans une phase de mutation économique profonde avec l’exploitation de ses ressources pétrolières et gazières. En 2024, la croissance devrait atteindre 5,5 %, grâce au lancement de projets énergétiques d’envergure.

Le projet Sangomar, qui prévoit une production de 100 000 barils de pétrole par jour, et le champ gazier GTA (Grand Tortue Ahmeyim), partagé avec la Mauritanie, marquent l’entrée du Sénégal dans le cercle des pays producteurs d’hydrocarbures. Ces nouvelles ressources offrent des perspectives de revenus significatives pour financer le développement économique et les infrastructures.

Toutefois, la dépendance aux hydrocarbures comporte des risques. L’expérience d’autres pays africains montre que la gestion des revenus pétroliers est cruciale pour éviter la malédiction des ressources. Le Sénégal devra mettre en place une gouvernance rigoureuse pour assurer que ces nouvelles richesses bénéficient à l’ensemble de l’économie et ne creusent pas les inégalités.

En parallèle, le pays poursuit sa stratégie de diversification, notamment à travers le Plan Sénégal Émergent (PSE). Des investissements sont réalisés dans l’industrie manufacturière et les technologies numériques, qui attirent de plus en plus de capitaux étrangers.

L’enjeu pour le Sénégal sera donc de maintenir une croissance équilibrée, en tirant parti des hydrocarbures tout en consolidant d’autres secteurs pour éviter une trop forte dépendance aux revenus pétroliers.

Lynn-karelle
Expert Etude Sectorielle
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